Résumé
La civilisation occidentale n’a plus qu’une valeur commune : l’individu. Ce paradoxe est désormais à bout de souffle. Au développement d’une radicalisation islamiste nourrie au cœur même de l’Occident répond la montée de ces « populismes » d’Italie et d’Autriche, de Hongrie et de Pologne, du Brexit et de Donald Trump. Tous ces phénomènes concourent à fissurer le modèle de la démocratie libérale unanimement adopté depuis la fin du xxe siècle.
Ce retour du tragique dans l’histoire occidentale exprime l’échec du projet politique postmoderne à offrir à l’homme d’aujourd’hui ce dont il a le plus besoin : un sentiment d’appartenance, nourri par une quête collective de sens. L’individualisme des démocraties libérales a détruit cette capacité à penser les finalités communes en l’assimilant au totalitarisme. Mais en réduisant ainsi la politique à un vaste processus de régulation des intérêts de chacun, la postmodernité a précipité l’ensauvagement du monde qu’elle prétendait justement éviter. Pour éloigner les orages qui menacent de l’emporter, l’Occident ne peut donc se borner à muscler son arsenal répressif, ni à réaffirmer la sacralité des droits individuels. Il doit aussi, peut-être surtout, redonner à la politique ses lettres de noblesse en reconnaissant qu’il n’est pas de paix durable sans destin commun, et pas de destin commun sans enracinement dans une communauté d’appartenance.